Messages : 2286 Date de naissance : 16/01/1944 Date d'inscription : 09/11/2022 Age : 80 Localisation : Picardie
Sujet: Poèmes d'auteurs de Olia Dim 9 Juil - 7:24
Rappel du premier message :
" La prospérité montre les heureux, l'adversité révèle les grands. " Pline le Jeune
" Il faut de plus grandes vertus pour soutenir la bonne fortune que la mauvaise. " La Rochefoucauld
" L'âme vile est enflée d'orgueil dans la prospérité et abattue dans l'adversité. " Epicure
" La prospérité découvre nos vices et l'adversité nos vertus. " Francis Bacon
Dernière édition par olia le Sam 10 Fév - 11:12, édité 1 fois
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olia
Messages : 2286 Date de naissance : 16/01/1944 Date d'inscription : 09/11/2022 Age : 80 Localisation : Picardie
Sujet: Re: Poèmes d'auteurs de Olia Dim 28 Juil - 7:38
Le baiser (I) Poète : Germain Nouveau (1851-1920) Recueil : Valentines (1885). N'êtes-vous pas toute petite Dans votre vaste appartement, Où comme un oiseau qui palpite Voltige votre pied normand ?
N'est-elle pas toute mignonne, Blanche dans l'ombre où tu souris, Votre taille qui s'abandonne, Parisienne de Paris ?
N'est-il pas à Vous, pleine d'âme, Franc comme on doit l'être, à l'excès, Votre cœur d'adorable femme, Nu, comme votre corps français ?
Ne sont-ils pas, à Vous si fière, Les neiges sous la nuit qui dort Dans leur silence et leur lumière, Vos magnifiques seins du Nord ?
N'est-il pas doux, à Vous sans haine, Frémissante aux bruits de l'airain, Votre ventre d'Européenne, Oui votre ventre européen ;
N'est-elle pas semblable au Monde, Pareille au globe entouré d'air, Ta croupe terrestre aussi ronde Que la montagne et que la mer ?
N'est-il pas infini le râle De bonheur pur comme le sel, Dans ta matrice interastrale Sous ton baiser universel ?
Et par la foi qui me fait vivre Dans ton parfum et dans ton jour, N'entre-t-elle pas, mon âme ivre, En plein, au plein de ton amour ?
Germain Nouveau.
olia
Messages : 2286 Date de naissance : 16/01/1944 Date d'inscription : 09/11/2022 Age : 80 Localisation : Picardie
Sujet: Re: Poèmes d'auteurs de Olia Mar 30 Juil - 7:20
Le baiser (II) Poète : Germain Nouveau (1851-1920) Recueil : Valentines (1885). Comme une ville qui s'allume Et que le vent achève d'embraser, Tout mon cœur brûle et se consume, J'ai soif, oh ! j'ai soif d'un baiser.
Baiser de la bouche et des lèvres Où notre amour vient se poser, Plein de délices et de fièvres, Ah ! j'ai soif, j'ai soif d'un baiser !
Baiser multiplié que l'homme Ne pourra jamais épuiser, Ô toi, que tout mon être nomme, J'ai soif, oui, j'ai soif d'un baiser.
Fruit doux où la lèvre s'amuse, Beau fruit qui rit de s'écraser, Qu'il se donne ou qu'il se refuse, Je veux vivre pour ce baiser.
Baiser d'amour qui règne et sonne Au cœur battant à se briser, Qu'il se refuse ou qu'il se donne, Je veux mourir de ce baiser.
Germain Nouveau.
olia
Messages : 2286 Date de naissance : 16/01/1944 Date d'inscription : 09/11/2022 Age : 80 Localisation : Picardie
Sujet: Re: Poèmes d'auteurs de Olia Jeu 1 Aoû - 7:44
Le baiser (III) Poète : Germain Nouveau (1851-1920) Recueil : Valentines (1885). « Tout fait l'amour. » Et moi, j'ajoute, Lorsque tu dis : « Tout fait l'amour » : Même le pas avec la route, La baguette avec le tambour.
Même le doigt avec la bague, Même la rime et la raison, Même le vent avec la vague, Le regard avec l'horizon.
Même le rire avec la bouche, Même l'osier et le couteau, Même le corps avec la couche, Et l'enclume sous le marteau.
Même le fil avec la toile Même la terre avec le ver, Le bâtiment avec l'étoile, Et le soleil avec la mer.
Comme la fleur et comme l'arbre, Même la cédille et le ç, Même l'épitaphe et le marbre, La mémoire avec le passé.
La molécule avec l'atome, La chaleur et le mouvement, L'un des deux avec l'autre tome, Fût-il détruit complètement.
Un anneau même avec sa chaîne, Quand il en serait détaché, Tout enfin, excepté la Haine, Et le cœur qu'Elle a débauché.
Oui, tout fait l'amour sous les ailes De l'Amour, comme en son Palais, Même les tours des citadelles Avec la grêle des boulets.
Même les cordes de la harpe Avec la phalange du doigt, Même le bras avec l'écharpe, Et la colonne avec le toit.
Le coup d'ongle ou le coup de griffe, Tout, enfin tout dans l'univers, Excepté la joue et la gifle, Car... dans ce cas l'est à l'envers.
Et (dirait le latin honnête Parlant des choses de Vénus) Comme la queue avec la tête, Comme le membre avec l'anus.
Germain Nouveau.
olia
Messages : 2286 Date de naissance : 16/01/1944 Date d'inscription : 09/11/2022 Age : 80 Localisation : Picardie
Sujet: Re: Poèmes d'auteurs de Olia Ven 2 Aoû - 7:34
Le baiser (IV) Poète : Germain Nouveau (1851-1920) Recueil : Valentines (1885). Le Baiser de ton rêve Est celui de l'Amour ! Le jour, le jour se lève, Clairons, voici le jour !
Le Baiser de mon rêve Est celui de l'Amour ! Enfin, le jour se lève ! Clairons, voici le jour !
La caresse royale Est celle de l'Amour. Battez la générale, Battez, battez, tambour !
Car l'Amour est horrible Au gouffre de son jour ! Pour le tir à la cible Battez, battez, tambour.
Sa caresse est féline Comme le point du jour : Pour gravir la colline Battez, battez, tambour !
Sa caresse est câline Comme le flot du jour : Pour gravir la colline, Battez, battez, tambour.
Sa caresse est énorme Comme l'éclat du jour : Pour les rangs que l'on forme, Battez, battez, tambour !
Sa caresse vous touche Comme l'onde et le feu ; Pour tirer la cartouche, Battez, battez un peu.
Son Baiser vous enlace Comme l'onde et le feu : Pour charger la culasse, Battez, battez un peu.
Sa Caresse se joue Comme l'onde et le feu : Tambour, pour mettre en joue, Battez, battez un peu.
Sa caresse est terrible Comme l'onde et le feu : Pour le cœur trop sensible Battez, battez un peu.
Sa caresse est horrible, Comme l'onde et le feu : Pour ajuster la cible, Restez, battez un peu.
Cette Caresse efface Tout, sacré nom de Dieu ! Pour viser bien en face, Battez, battez un peu.
Son approche vous glace Comme ses feux passés : Pour viser bien en face Cessez.
Car l'Amour est plus belle Que son plus bel amour : Battez pour la gamelle, Battez, battez tambour,
Toute horriblement belle Au milieu de sa cour : Sonnez la boute-selle, Trompettes de l'Amour !
L'arme la plus habile Est celle de l'Amour : Pour ma belle, à la ville, Battez, battez tambour !
Car elle est moins cruelle Que la clarté du jour : Sonnez la boute-selle, Trompettes de l'Amour !
L'amour est plus docile Que son plus tendre amour : Pour ma belle, à la ville, Battez, battez tambour.
Elle est plus difficile À plier que le jour : Pour la mauvaise ville, Battez, battez tambour.
Nul n'est plus difficile À payer de retour : Pour la guerre civile, Battez, battez tambour.
Le Baiser le plus large Est celui de l'Amour : Pour l'amour et la charge, Battez, battez tambour.
Le Baiser le plus tendre Est celui de l'Amour, Battez pour vous défendre, Battez, battez tambour.
Le Baiser le plus chaste Est celui de l'Amour : Amis, la terre est vaste, En avant, le tambour.
Le Baiser le plus grave Est celui de l'Amour : Battez, pour l'homme brave, Battez, battez tambour.
Le Baiser qui se fâche Est celui de l'Amour : Battez pour l'homme lâche, Battez, battez tambour.
Le Baiser le plus mâle Est celui de l'Amour : Pour le visage pâle Battez, battez tambour.
La Caresse en colère Est celle de l'Amour : Car l'Amour, c'est la guerre, Battez, battez tambour.
Le Baiser qu'on redoute Est celui de l'Amour : Pour écarter le doute, Battez, battez tambour.
L'art de jouir ensemble Est celui de l'Amour : Or, mourir lui ressemble : Battez, battez tambour.
L'art de mourir ensemble Est celui de l'Amour : Battez fort pour qui tremble, Battez, battez tambour.
Le Baiser le plus calme Est celui de l'Amour : Car la paix, c'est sa palme, Battez, battez tambour.
La souffrance, la pire, Est d'être sans l'Amour : Battez, pour qu'elle expire, Battez, battez tambour.
Le Baiser qui délivre Est celui de l'Amour : Battez pour qui veut vivre, Battez, battez tambour.
La Caresse éternelle Est celle de l'Amour : Battez, la mort est belle, Battez, battez tambour.
La guerre est la plus large Des portes de l'Amour : Pour l'assaut et la charge, Battez, battez tambour.
La porte la plus sainte Est celle de la mort : Pour étouffer la plainte Battez, battez plus fort.
L'atteinte la moins grave Est celle de la mort : L'amour est au plus brave, La Victoire... au plus fort !
Germain Nouveau.
olia
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Sujet: Re: Poèmes d'auteurs de Olia Dim 4 Aoû - 7:33
Le cidre Poète : Germain Nouveau (1851-1920) Recueil : Valentines (1885). Je veux en vider un grand litre. C'est très chic le cidre, et d'abord C'est le tien ! je l'aime à ce titre. Il est clair, derrière sa vitre, Comme une aube des Ciels du Nord.
C'était le cidre de Corneille, Ne pas confondre avec le Cid : Le premier sort de la bouteille, L'autre, le casque sur l'oreille, Doit venir de Valladolid.
C'était le cidre de Guillaume, Duc des Normands pleins de valeur, Qui fit, sur leur nouveau royaume, Flotter les plumes de son heaume, Plus doux que les pommiers en fleur !
Ah ! vos pommiers criblés de pommes, Savez-vous qu'ils ne sont pas laids ! Il me semble que nous y sommes, Non loin des flots, où sont les hommes, Près du sable, où sont les mollets.
Et les pommes donc ! qui n'adore Leurs jolis rouges triomphants ! Qu'elles soient deux ou plus encore ; Sans les pommes que l'on dévore, Personne ne ferait d'enfants.
L'humanité serait peu flère ; Vos cœurs, Femmes, seraient glacés. Sans les pommes... qu'avait ton père, Sans celles qu'adorait ma mère Oh !... plutôt trop, que pas assez.
Ah ! bienheureuses sont les branches, Qui cachent, dans leur gai fouillis, Le cidre d'Harfleur ou d'Avranches, Que l'on boit gaiement, les dimanches, Aux cabarets de ton pays !
Et bienheureux sont ceux qui portent Ces fruits dans toutes leurs saveurs ; Que jamais, jamais ils n'avortent, Puisque aussi bien c'est d'eux que sortent Les Buveuses et les Buveurs !
Germain Nouveau.
olia
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Sujet: Re: Poèmes d'auteurs de Olia Mar 6 Aoû - 7:40
Le Dieu Poète : Germain Nouveau (1851-1920) Recueil : Valentines (1885). N'est pas athée qui veut. Napoléon.
Je vous dis un soir une chose Dont vous fûtes peut-être cause : J'ai découvert un nouveau Dieu. « Nous irons le prêcher ensemble », Me répondîtes-vous ; j'en tremble Car... vous vous avanciez un peu.
Puisque, jusqu'à preuve apportée, Je ne veux être qu'un athée Qui ne peux croire qu'en l'Amour, Quel Dieu, répondez-moi, quel diable De Dieu né mort ou né viable Avais-je bien pu mettre au jour ?
Mais... j'avais dit vrai... sans blasphème, Vous allez voir... cherchez vous-même... Vous ne trouvez pas ? non ? vraiment ! Je vais vous mettre sur la route : C'est un Dieu bon... alors... nul doute Que ce ne soit un Dieu charmant ;
Voyons !... le mot du... théorème, C'est ?... c'est ?... mais c'est Vous, Vous que j'aime, Que j'aime avec âme, avec feu ; Mais c'est ton corps, mais c'est ton âme, Mais c'est Toi, ma petite femme, Toi, cet adoré petit Dieu ;
C'est ta raison et ton ivresse, C'est ton esprit et ta caresse ; Mais c'est Toi, c'est Toi, c'est Toi, Toi, Toi... ce n'est pas une autre femme, Toi... mais... pardonnez-moi, Madame, J'ai l'air... d'un grand effronté, moi.
Depuis qu'en Vous j'ai voulu vivre, L'amour de sagesse m'enivre, De sagesse ?... tiens !... c'est curieux ! C'est la sagesse qui m'enflamme ! Mais, c'est assez causé, Madame, Maintenant, soyons sérieux !
Nous allons arpenter le globe, Dépêchons ! Mettez votre robe Et votre chapeau préféré... J'ai votre parole, il me semble ? Nous allons vous prêcher ensemble, Vous-même Vous Vous prêcherez !
Germain Nouveau.
olia
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Sujet: Re: Poèmes d'auteurs de Olia Jeu 8 Aoû - 7:39
Fou Poète : Germain Nouveau (1851-1920) Recueil : Valentines (1885). Que je sois un fou, qu'on le dise, Je trouve ça tout naturel, Ayant eu ma part de bêtise Et commis plus d'une sottise, Depuis que je suis... temporel.
Je suis un fou, quel avantage, Madame ! un fou, songez-y bien, Peut crier... se tromper d'étage, Vous proposer... le mariage, On ne lui dira jamais rien,
C'est un fou ; mais lui peut tout dire, Lâcher parfois un terme vil, Dans ce cas le mieux c'est d'en rire, Se fâcher serait du délire, À quoi cela servirait-il ?
C'est un fou. Si c'est un bonhomme Laissant les gens à leurs métiers, Peu contrariant, calme... en somme, Distinguant un nez d'une pomme, On lui pardonne volontiers.
Donc, je suis fou, je le révèle. Nous l'avons, Madame, en dormant, Comme dit l'autre, échappé belle ; J'aime mieux être un sans cervelle Que d'être un sage, assurément.
Songez donc ! si j'étais un sage, Je fuirais les joyeux dîners ; Je n'oserais voir ton corsage ; J'aurais un triste et long visage Et des lunettes sur le nez ;
Mais, je ne suis qu'un fou, je danse, Je tambourine avec mes doigts Sur la vitre de l'existence. Qu'on excuse mon insistance, C'est un fou qu'il faut que je sois !
C'est trop fort, me dit tout le monde, Qu'est-ce que vous nous chantez là ? Pourquoi donc, partout à la ronde, À la brune comme à la blonde, Parler de la sorte ? — Ah ! voilà !
Je vais même plus loin, personne Ne pourra jamais me guérir, Ni la sagesse qui sermonne, Ni le bon Dieu, ni la Sorbonne, Et c'est fou que je veux mourir.
C'est fou que je mourrai du reste, Mais oui, Madame, j'en suis sûr, Et d'abord... de ton moindre geste, Fou... de ton passage céleste Qui laisse un parfum de fruit mûr,
De ton allure alerte et franche, Oui, fou d'amour, oui, fou d'amour, Fou de ton sacré... coup de hanche, Qui vous fiche au cœur la peur... blanche, Mieux... qu'un roulement de tambour ;
Fou de ton petit pied qui vole Et que je suivrais n'importe où, Je veux dire... au Ciel ;... ma parole ! J'admire qu'on ne soit pas folle, Je plains celui qui n'est pas fou.
olia
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Sujet: Re: Poèmes d'auteurs de Olia Ven 9 Aoû - 7:33
Fraternité Poète : Germain Nouveau (1851-1920) Recueil : La doctrine de l'amour (1881). Frère, ô doux mendiant qui chantes en plein vent, Aime-toi, comme l'air du ciel aime le vent.
Frère, poussant les boeufs dans les mottes de terre, Aime-toi, comme aux champs la glèbe aime la terre.
Frère, qui fais le vin du sang des raisins d'or, Aime-toi, comme un cep aime ses grappes d'or.
Frère, qui fais le pain, croûte dorée et mie, Aime-toi, comme au four la croûte aime la mie.
Frère, qui fais l'habit, joyeux tisseur de drap, Aime-toi, comme en lui la laine aime le drap.
Frère, dont le bateau fend l'azur vert des vagues, Aime-toi, comme en mer les flots aiment les vagues.
Frère, joueur de luth, gai marieur de sons, Aime-toi, comme on sent la corde aimer les sons.
Mais en Dieu, frère, sache aimer comme toi-même Ton frère, et quel qu'il soit, qu'il soit comme toi-même.
Germain Nouveau.
olia
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Sujet: Re: Poèmes d'auteurs de Olia Sam 10 Aoû - 7:29
Gris Poète : Germain Nouveau (1851-1920) Recueil : Valentines (1885). Je connais un charmant ivrogne, Autant vous le nommer, ma foi ! Dire que vous avez la trogne, Ce serait mentir sans vergogne. Pourtant, un soir, écoutez-moi !
Vous aviez bu trop de champagne, Ça se lisait dans vos yeux pers. Vous battiez un peu la campagne, Sans feuille de figuier ni pagne À votre esprit, vraiment, sans pairs.
Et vous me dérouliez le thème De tous les jolis mouvements Que votre corps sait bien que j'aime. J'étais, d'ailleurs, ivre moi-même, Au Bon-Bock, tu vois si je mens.
La brasserie était houleuse, On aurait dit, sur l'Hellespont, D'une cabine nuageuse, Quand l'eau, changée en Maufrigneuse, Choque les gens dans l'entrepont.
Vous aviez l'air gai d'une chatte Qui joue et sent son ongle armé, Forte, ambigüe, et délicate, Comme une rime sous la patte Magistrale de Mallarmé !
Je flottais comme la moustache De Paul Verlaine au plectre d'or, Je voyais couleur de pistache ; Camille agitait sa cravache, Sur je ne sais plus quel butor ;
Si bien qu'au milieu des querelles Je vous retrouvai sur un banc, Dans l'attitude de ces Belles Que Forain, dans ses aquarelles, Habille d'un bout de ruban.
Tu t'endormais sur mon épaule. Alors, je fis signe au cocher. Ces choses-là, c'est toujours drôle ! J'entrais d'autant mieux dans ce rôle Que j'aurais eu peine à marcher ;
Quand on nous déposa sur terre, Vous fîtes un léger faux pas, Le seul qu'on vous vit jamais faire ; Encor, même à l'œil trop sévère, Peut-être ne l'était-il pas ?
Car, dans l'ombre où s'éteint le rêve De mes désirs réalisés, Ton ivresse que l'Art relève Ouvrait, ô noble Fille d'Ève, La volière à tous les baisers !
Germain Nouveau.
olia
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Sujet: Re: Poèmes d'auteurs de Olia Dim 11 Aoû - 7:27
Hymne Poète : Germain Nouveau (1851-1920) Recueil : La doctrine de l'amour (1881). Amour qui voles dans les nues, Baisers blancs, fuyant sur l'azur, Et qui palpites dans les mues, Au nid sourd des forêts émues ;
Qui cours aux fentes des vieux murs, Dans la mer qui de joie écume, Au flanc des navires, et sur Les grandes voiles de lin pur ;
Amour sommeillant sur la plume Des aigles et des traversins, Que clame la sibylle à Cume, Amour qui chantes sur l'enclume ;
Amour qui rêves sur les seins De Lucrèce et de Messaline, Noir dans les yeux des assassins, Rouge aux lèvres des spadassins ;
Amour riant à la babine Des dogues noirs et des taureaux, Au bout de la patte féline Et de la rime féminine ;
Amour qu'on noie au fond des brocs Ou qu'on reporte sur la lune, Cher aux galons des caporaux, Doux aux guenilles des marauds ;
Aveugle qui suis la fortune, Menteur naïf dont les leçons Enflamment, dans l'ombre opportune, L'oreille rose de la brune ;
Amour bu par les nourrissons Aux boutons sombres des Normandes ; Amour des ducs et des maçons, Vieil amour des jeunes chansons ;
Amour qui pleures sur les brandes Avec l'angélus du matin, Sur les steppes et sur les landes Et sur les polders des Hollandes ;
Amour qui voles du hautain Et froid sourire des poètes Aux yeux des filles dont le teint Semble de fleur et de satin ;
Qui vas, sous le ciel des prophètes, Du chêne biblique au palmier, De la reine aux anachorètes, Du coeur de l'homme au coeur des bêtes ;
De la tourterelle au ramier, Du valet à la demoiselle, Des doigts du chimiste à l'herbier, De la prière au bénitier ;
Du prêtre à l'hérétique belle, D'Abel à Caïn réprouvé ; Amour, tu mêles sous ton aile Toute la vie universelle !
Mais, ô vous qui m'avez trouvé, Moi, pauvre pécheur que Dieu pousse Diseur de Pater et d'Ave, Sans oreiller que le pavé,
Votre présence me soit douce.
Germain Nouveau.
olia
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Idiot Poète : Germain Nouveau (1851-1920) Recueil : Valentines (1885). Nous lisons dans Legrand du Saulle Que le crétin a du goût pour L'arithmétique... tiens ! c'est drôle ! Et la musique... du tambour.
Qu'il a du goût pour la peinture ; J'en ai fait... pas... beaucoup, beaucoup, Mais Henri Laujol s'aventure Jusqu'à me trouver quelque goût.
J'aime beaucoup l'arithmétique ; Ne disons pas cela trop haut ; Mais la musique ! Oh ! la musique ! Je suis peut-être un idiot.
Cependant, je vis tout de même, Je ne m'en porte pas plus mal, Et puis... quand c'est Vous que l'on aime, Se croire idiot... serait mal.
Et j'embrasse Legrand du Saulle Pour n'avoir pas dit qu'un crétin Peut faire en vers planter un saule Bien connu du Quartier Latin.
Germain Nouveau.
olia
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Sujet: Re: Poèmes d'auteurs de Olia Mar 13 Aoû - 7:39
Germain Nouveau (1851-1920) Recueil : La doctrine de l'amour (1881). Dieu sait bien que la femme est maîtresse de l'homme, Mais l'époux généreux, chez l'épouse économe, S'ils sont deux bons chrétiens en un cœur bien fondus, Libre, vit dans la paix, loin des jougs défendus. Simple, comme un enfant qui partage une orange, Il fait toujours deux parts de tout fruit mûr qu'il mange. Il choisit les meilleurs qui sont les fruits permis : C'est un sage content du monde où Dieu l'a mis. Pauvre, il a les trésors profonds de l'Évangile, Riche, il tient ses greniers grands ouverts sur la ville. Quand le soir vient, l'étoile à sa lampe sourit. Couple qui s'épousa sous les yeux de l'Esprit, Rébecca dont le cœur battit à grands coups d'aile, En voyant Isaac sortir au-devant d'elle, Isaac dont le cœur en fête remarqua L'anneau d'or fin qui luit au nez de Rébecca, Étaient moins saintement amoureux l'un de l'autre, Que ces époux, courbés au souffle de l'apôtre, Quand leur âme aspira, près du cierge éclairé, Le parfum frais qui sort du vieux texte sacré. Comme il est bon et droit, que Jésus est son maître, S'il parle, elle a des yeux ravis de se soumettre ; Qu'elle parle, il écoute, heureux de se plier Aux désirs purs d'un cœur que Jésus sut lier. Tous deux savent le prix des torts que l'on pardonne. Au milieu des enfants que le Seigneur leur donne, Ils laissent se mêler aux fils d'or éclatants Les fils sombres qui sont au dévidoir du temps. L'époux travaille ; il est ouvrier ou poète ; Il explique aux siens Dieu dont le ciel est la fête. Un enfant vous écoute avec tant d'appétit ! C'est innocent, c'est bon, c'est grave, c'est petit ! Elle, quand elle file, un bras hors de la manche, Elle a l'air de filer son âme en laine blanche, Et son cœur doux s'écoule aux ondes de son lait, Flot parfumé, pareil au flot pur qui coulait Du sein sacré sur qui Dieu, tout petit, ne bouge Que sa lèvre d'enfant, humble fleurette rouge. Dans la neige du linge et les tulles au vent, Voilà la mère, avec son sourire vivant Dont la chambre s'échauffe et dont l'ombre s'éclaire. Femme aux seins mûrs, miracle, ô reine populaire ! Majesté des grands cils abaissés sur l'enfant ! Il s'abandonne, il dort. Un baiser le défend. Le père le contemple, un rire sur la bouche. Il est tel que, devant une rose farouche, Un bon peintre amoureux de la gloire des fleurs. Tous vivent dans le calme et les claires couleurs. Ô chaleur maternelle ! ô prière qui vole ! Ô bouches ébauchant la première parole ! Chère tribu, petit peuple qui grandissez, Mère qui d'une main délicate emplissez De feuilles et de fruits les faïences fleuries, Père au sourire plein de chaudes causeries, Servante qui tournez au bruit clair des sabots : Si vous êtes sereins, même avec des tombeaux, Si vous gardez entier l'amour de la famille, Dont la laine encor moins que l'honneur vous habille, Si vous restez amis, quoi ! n'est-ce pas un peu Parce qu'à tous vos soins vous savez mêler Dieu, Qu'il vous tient sous son aile et qu'il vous a plu d'être Unis par Jésus-Christ et bénis par son prêtre !
Germain Nouveau.
olia
Messages : 2286 Date de naissance : 16/01/1944 Date d'inscription : 09/11/2022 Age : 80 Localisation : Picardie
Sujet: Re: Poèmes d'auteurs de Olia Mer 14 Aoû - 7:19
Immensité Poète : Germain Nouveau (1851-1920) Recueil : La doctrine de l'amour (1881). Voyez le ciel, la terre et toute la nature ; C'est le livre de Dieu, c'est sa grande écriture ; L'homme le lit sans cesse et ne l'achève point. Splendeur de la virgule, immensité du point ! Comètes et soleils, lettres du feu sans nombre ! Pages que la nuit pure éclaire avec son ombre ! Le jour est moins charmant que les yeux de la nuit. C'est un astre en rumeur que tout astre qui luit. Musique d'or des cieux faite avec leur silence ; Et tout astre immobile est l'astre qui s'élance. Ah ! que Dieu, qui vous fit, magnifiques rayons, Cils lointains qui battez lorsque nous sommeillons, Longtemps, jusqu'à nos yeux buvant votre énergie, Prolonge votre flamme et sa frêle magie ! La terre est notre mère au sein puissant et beau ; Comme on ouvre son cœur, elle ouvre le tombeau, Faisant ce que lui dit le Père qui regarde. Dieu nous rend à la Mère, et la Mère nous garde ; Mais comme le sillon garde le grain de blé, Pour le crible, sur l'aire où tout sera criblé : Récolte dont le Fils a préparé les granges, Et dont les moissonneurs vermeils seront les anges. La nature nous aime, elle cause avec nous ; Les sages l'écoutaient, les mains sur leurs genoux, Parler avec la voix des eaux, le bruit des arbres. Son cœur candide éclate au sein sacré des marbres ; Elle est la jeune aïeule ; elle est l'antique enfant ! Elle sait, elle dit tout ce que Dieu défend À l'homme, enfant qui rit comme un taureau qui beugle ; Et le regard de Dieu s'ouvre dans cette aveugle. Quiconque a le malheur de violer sa loi A par enchantement soi-même contre soi. N'opposant que le calme à notre turbulence, Elle rend, au besoin, rigueur pour violence, Terrible à l'insensé, docile à l'homme humain : Qui soufflette le mur se fait mal à la main. La nature nous aime et donne ses merveilles. Ouvrons notre âme, ouvrons nos yeux et nos oreilles : Voyez la terre avec chaque printemps léger, Ses verts juillets en flamme ainsi que l'oranger, Ses automnes voilés de mousselines grises, Ses neiges de Noël tombant sur les églises, Et la paix de sa joie et le chant de ses pleurs. Dans la saveur des fruits et la grâce des fleurs, La vie aussi nous aime, elle a ses heures douces, Des baisers dans la brise et des lits dans les mousses. Jardin connu trop tard, sentier vite effacé Où s'égarait Virgile, où Jésus a passé. Tout nous aime et sourit, jusqu'aux veines des pierres ; La forme de nos cœurs tremble aux feuilles des lierres ; L'arbre, où le couteau grave un chiffre amer et blanc. Fait des lèvres d'amour de sa blessure au flanc ; L'aile de l'hirondelle annonce le nuage ; Et le chemin nous aime : avec nous il voyage ; La trace de nos pas sur le sable, elle aussi Nous suit ; elle nous aime, et l'air dit : « me voici ! » Rendons-leur cet amour, soyons plus doux aux choses Coupons moins le pain blanc et cueillons moins les roses Nous parlons du caillou comme s'il était sourd, Mais il vit ; quand il chante, une étincelle court... Ne touchons rien, pas même à la plus vile argile, Sans l'amour que l'on a pour le cristal fragile. La nature très sage est dure au maladroit, Elle dit : le devoir est la borne du droit ; Elle sait le secret des choses que vous faites ; Elle bat notre orgueil en nous montrant les bêtes, Humiliant les bons qui savent leur bonté, Comme aussi les méchants qui voient leur cruauté. Grâce à la bonté, l'homme à sa place se range, Moins terre que la bête, il est moins ciel que l'ange Dont l'aile se devine à l'aile de l'air bleu. Partout où l'homme écrit « Nature », lisez « Dieu ».
olia
Messages : 2286 Date de naissance : 16/01/1944 Date d'inscription : 09/11/2022 Age : 80 Localisation : Picardie
Sujet: Re: Poèmes d'auteurs de Olia Mar 20 Aoû - 7:16
Invocation Poète : Germain Nouveau (1851-1920) Recueil : La doctrine de l'amour (1881). Ô mon Seigneur Jésus, enfance vénérable, Je vous aime et vous crains petit et misérable, Car vous êtes le fils de l'amour adorable.
Ô mon Seigneur Jésus, adolescent fêté, Mon âme vous contemple avec humilité, Car vous êtes la Grâce en étant la Beauté.
Ô mon Seigneur Jésus qu'un vêtement décore, Couleur de la mer calme et couleur de l'aurore, Que le rouge et le bleu vous fleurissent encore !
Ô mon Seigneur Jésus, chaste et doux travailleur, Enseignez-moi la paix du travail le meilleur, Celui du charpentier ou celui du tailleur.
Ô mon Seigneur Jésus, semeur de paraboles Qui contiennent l'or clair et vivant des symboles, Prenez mes vers de cuivre ainsi que des oboles.
Ô mon Seigneur Jésus, ô convive divin, Qui versez votre sang comme on verse le vin, Que ma faim et ma soif n'appellent pas en vain !
Ô mon Seigneur Jésus, vous qu'en brûlant on nomme, Mort d'amour, dont la mort sans cesse se consomme, Que votre vérité s'allume au coeur de l'homme !
Germain Nouveau.
olia
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Sujet: Re: Poèmes d'auteurs de Olia Mer 21 Aoû - 7:27
J'ai du goût pour la flâne
Poète : Germain Nouveau (1851-1920)
Recueil : Premiers vers (1872-1878).
Dixain.
J'ai du goût pour la flâne, et j'aime, par les rues,
Les réclames des murs fardés de couleurs crues,
La Redingote Grise, et Monsieur Gallopau ;
L'Hérissé qui rayonne au-dessous d'un chapeau ;
La femme aux cheveux faits de teintes différentes.